Un peu de culture . . .

Ils nous amusent, nous ravissent ou nous énervent, mais ne laissent personne indifférent. Certains leur vouent un véritable culte taudis que d'autres les pourchassent pour les kidnapper. Ces personnages insolites, objets d'amour ou de haine ne sont autres bien sûr que les nains de jardin. Mais, en fait, savez-vous qui sont-ils réellement?

En France, on en compte déjà plusieurs millions. Quant à l'Allemagne, patrie du nain, elle en possède 27 millions et en fabrique 2 millions chaque année pour en exporter la moitié au Japon, la Scandinavie, les Etats-Unis … Plus qu'une mode localisée dans notre petite région, il s'agit donc d'un véritable fait de société. Mais d'où sort donc ce fameux nain kitch, emblème des jardins populaires?

On raconte que l'ancêtre du nain de jardin n'est autre que Priape, le fils de Dyonisos et d'Aphrodite qui fut abandonné par sa mère tellement il était monstrueux. De taille minuscule, son corps était difforme et son pénis énorme ! A cause de ce formidable attribut, on fit de lui une divinité de la fécondité des vergers et des jardins.

En réalité, le pauvre Priape est un paradoxe vivant. Car s'il possède un membre impressionnant, en perpétuelle érection, il ne «conclut » jamais. Handicapé et obsédé, il symbolise la fertilité, mais ne parvient jamais à éjaculer. Donc, il lui est impossible de féconder. Or, si d'aventure il surprend un voleur de pommes ou de salades dans l'enclos dont il a la garde, il se déchaîne alors et viole l'intrus ou l'intruse de son phallus démoniaque. Voilà d'où vient sans doute la réputation du nain lubrique et violeur qui, figé dans un jardin, soudain se réveille et prend vie. Ce genre de fantasmes a conduit certains esprits pervers à donner de Blanche Neige et les sept nains une version bien différente de ce qu'elle est réellement... Il en reste que leur présence en grand nombre dans les jardins (ou dans certains locaux, qui sait?)ne s'explique aucunement par le symbole phallique qu'ils représentent. Mais bien par leur côté rassurant (ou kitch pour certains).

Certains spécialistes français en nanologie prétendent que celui-ci viendrait des entrailles de la terre. En effet, au moyen âge, il fallait de tout petits hommes pour exploiter les galeries étroites des mines. Pour repérer les mineurs dans les boyaux obscurs, on les habillait de couleurs vives, d'où le bonnet rouge typique et le tablier vert. Comme ils vivaient entre eux, on leur supposait des pouvoirs magiques. On s'en méfiait, on disait que leur travail leur faisait côtoyer les puissances infernales du centre de la terre...

Très vite, on en fit des sortes de démons. Les exploitants des mines exorcisèrent leurs peurs en taisant confectionner des figurines de terre ressemblant à leurs employés, histoire de paralyser leurs pouvoirs prétendument maléfiques... Ces sculptures décoratives connurent d'emblée un grand succès commercial et on les exporta vers l'Europe, notamment en Italie, où on les exposa pour la première fois dans les jardins. De gardiens de la mine, ils se transformèrent vite en protecteurs des jardins, chargés de veiller sur la bonne santé des plantes, fleurs, légumes, mais aussi intimider les voleurs (de quoi ?).

En Angleterre, il existe d'ailleurs un parc qui leur est entièrement consacré. Celui-ci abrite plusieurs centaines de sujets de toutes les époques. Si vous vous y rendez, on vous demandera de coiffer un bonnet rouge pour ne pas effaroucher nos amis les nains...

Il existe de plus un homme qui ne supporte pas qu'on s'en prenne à ces êtres innocents. Il s'agit de l'éminent professeur et docteur en nanologie, Fritz Friedmann, président de l'association internationale de protection des nains de jardins, fondée en 1980 en Suisse. Il a d'ailleurs récemment intenté un procès contre un irresponsable qui avait fabriqué des nains avec un couteau planté dans le dos, et qui les exhibait dans les foires. Celui-ci fut poursuivi en justice et condamné...

Comme vous pouvez le constater, le nain que nous connaissions peut cacher des apparences bien trompeuses. Plus qu'un simple compagnon de jardin, il peut devenir une véritable passion et ce, dans tous les sens du terme...

Guillaume Lederer


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